James Duke, père de la cigarette
moderne et pionnier de la mondialisation.
Big Browser. 14-11-2012. Le Monde.
James Duke. Fuente: BBC.
Le site de la BBC
consacre un long sujet à James Duke, le père de la cigarette moderne. Le
fondateur de l'université du même nom a non seulement permis
l'industrialisation de la cigarette sous la forme cylindrique qu'on lui connaît
aujourd'hui, mais il a également été un pionnier dans le marketing et le
système de distribution qui ont conduit à son implantation sur tous les
continents. En 1880, à l'âge de 24 ans, James Duke reprend l’entreprise
familiale de cigarettes à rouler, dans ce qui était alors une niche dans
l'industrie du tabac. Ce n'est que deux ans plus tard, lorsqu'il rencontre un
jeune mécanicien, James Bonsack, que son aventure démarre.Ce dernier lui fait
part de son idée de mécaniser la production de cigarettes et lui présente les
plans de sa nouvelle machine. Duke est de suite convaincu que les gens ne
demanderont qu'à fumer ces cigarettes parfaitement symétriques, fabriquées en
série, plutôt que les cigarettes artisanales ou les cigares, moins hygiéniques,
conçus à la main et avec de la salive humaine. Il a le nez creux. Cette
invention de Bonsack va révolutionner l'industrie de la cigarette.
Alors que son ancienne usine ne lui permettait de sortir que 200 cigarettes
par jour, la nouvelle machine en produit 120 000, soit 1/5 de la consommation
totale de l'époque aux Etats-Unis. "Il produisait alors plus de
cigarettes qu'il ne pouvait en vendre", explique Jordan Goodman,
auteur de l'ouvrage Le Tabac dans l'histoire, interrogé par la BBC.Il
trouve la solution dans la publicité et le marketing. Duke commence à
sponsoriser des courses automobiles, distribue gratuitement des cigarettes lors
de concours de beauté, et place ses publicités dans les premiers magazines.
Pour la seule année 1889, il dépense 800 000 dollars en diverses opérations
marketing, l'équivalent de 25 millions de dollars actuels ! En 1890, Duke prend
le contrôle de ses quatre grands concurrents sous une seule entité commerciale,
la fameuse American Tobacco Company. Il contrôle alors 40 % du marché
américain.Comme il l'avait pressenti, les gens apprécient ses cigarettes
industrielles. Mais bien que la consommation quadruple en quinze ans, elle
reste encore un marché de niche. Duke, fumeur invétéré de... cigares, souhaite
différencier les deux produits, tant dans leur utilisation que dans les lieux
où ils sont "consommés". Les méconnaissances scientifiques de
l'époque permettent en outre leur développement. Les cigarettes sont en effet
listées dans les encyclopédies pharmaceutiques jusqu'en 1906 et les médecins en
prescrivent pour soigner les toux et les tuberculoses. Il faudra attendre 1930
pour qu'une corrélation soit établie entre la cigarette et le cancer du poumon,
et 1964 pour que le lien causal soit définitivement prouvé.
Les cigarettes furent interdites dans 16 États américains entre 1890 et
1924, plus pour des questions de moralité que de santé publique. L'augmentation
constante des fumeurs parmi les jeunes et les femmes était alors perçue comme
un signe de la dégradation des mœurs. Le docteur Robert Jackler, professeur à l'école
de médecine de l'université Stanford, explique comment les femmes ont été
particulièrement ciblées. La cigarette est alors présentée comme un outil de
leur émancipation.
En 1902, James Duke forme la British American Tobbaco avec son rival
transatlantique, Imperial Tobacco. Packaging et marketing différenciés, mais le
produit reste le même. Plus d'une décennie avant la création de la Ford Model
T, Duke a déjà son produit universel. Beaucoup le considèrent comme un
précurseur de la mondialisation, comme celui qui a "ouvert la voie à
McDonald's et Starbucks" et à leurs produits standardisés, estime
Jordan Goodman.
La légende, relayée par Howard Cox de l'université de Worcester, veut que
James Duke aurait déplié une carte du monde et pointé la Chine du doigt : "C'est
ici que nous allons bâtir notre empire !" Le marchand de mort avait
bien de l'intuition. "Il a fait que le monde fume", tranche
Jordan Goodman. Ses défenseurs, qui louent son génie industriel, avancent
que Duke, décédé en 1925, ne connaissait pas, comme ses contemporains, les
effets néfastes du tabac, et estiment qu'un autre homme d'affaires se serait un
jour, quoi qu'il arrive, engouffré dans ce marché.
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